Santé publique : le marché de la peur
Un petit mot pour rebondir sur ce billet de Jean-Daniel Flaysakier (rédacteur en chef adjoint et spécialiste des questions de santé à la rédaction de France 2) auquel j'adhère totalement :
La mauvaise science des marchands de peur.
Loin de moi l'idée de fustiger tous les lanceurs d'alerte (j'ai d'ailleurs, je crois, contribué à relayer certaines de leurs alertes), mais le terme devient galvaudé. Et il se trouve que je travaille en ce moment sur un cas qui illustre, ô combien pertinemment, les propos de M Flaysakier (qui, lui, ne cite aucune affaire particulière ni aucun nom - pour des raisons professionnelles sans doute).
Prenons, donc, le cas des "ondes électromagnétiques", et plus particulièrement celui du wifi. J'ai, il y a quelques mois, décidé de participer à un projet de médiation scientifique sur ce thème (et justement parce qu'il entrait dans la case "lanceurs d'alerte" - sauf qu'à l'époque, je me voyais déjà dans le rôle du lanceur d'alerte ou de la journaliste d'investigation dénonçant un scandale sanitaire).
Grand bien m'en a pris : malgré ce que peuvent nous laisser croire les discours d'associations "anti-ondes", qui font allégrement l'amalgame portable/wifi/antennes-relais/etc, aucun effet sanitaire du wifi n'a été démontré à ce jour... et pour cause : presque aucune étude scientifique ne s'intéresse au wifi ! Pourtant (est-ce dû au battage médiatique autour des bibliothécaires parisiens électrohypersensibles ?) il semble désormais incontournable de mentionner le wifi dans tout sujet traitant du portable et de la santé...
Et d'ailleurs, une telle couverture médiatique de ces sujets est-elle justifiée ? Evidemment, la santé humaine est un thème sur lequel il est important d'informer... et qui se vend bien. Ceci explique certainement la sortie régulière de nouveaux reportages, de "compléments d'enquête", alors que l'enquête n'a pas avancé...
Pour finir d'illustrer le propos de M Flaysakier, les ondes électromagnétiques ont bien sûr leurs "experts médiatiques", en les personnes de messieurs David Servan-Schreiber, psychiatre, et Dominique Belpomme, cancérologue - plus médiatiques qu'experts ?
Et pourtant, je ne suis pas "scientiste". Simplement, on ne peut pas tout mélanger, extrapoler, affirmer plus que ce que l'on sait à un moment donné... ce qui n'empêche pas d'appliquer le principe de précaution bien sûr.
Ce coup de gueule ne m'empêchera pas d'aller écouter Marie-Monique Robin (Le Monde selon Monsanto) demain à l'Institut de Journalisme de Bordeaux Aquitaine (thème : Ecologie et journalisme d'investigation), malgré ce qu'en pensent des gens comme l'AFIS ou le blog Imposteurs. Entre les lobbys industriels et ceux, peut-être plus insidieux, des associations militantes, je demande le droit de ne pas avoir à choisir mon camp, et commme David Abiker sur un tout autre sujet, d'être perplexe, tendance radicale.